Le Conseil constitutionnel valide la loi antiterroriste de Sarkozy – Actualités – ZDNet.fr
Législation – Disposition forte du texte, le principe de l’accès aux données de connexion sans l’autorisation d’un juge n’a pas été remis en cause. Le Conseil a simplement rappelé aux législateurs la nécessité de respecter la séparation des pouvoirs.
Le Conseil constitutionnel, par une décision du 19 janvier, a validé une disposition, pourtant très critiquée, de la loi antiterroriste portée par le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, et adoptée par le Sénat en décembre dernier.
Décrite dans l’article 6, cette disposition impose aux opérateurs télécoms, aux fournisseurs d’accès (FAI), mais aussi à tout établissement public proposant un accès au Net, comme les cybercafés, de conserver les données de connexion (« logs ») jusqu’à un an.
Mais surtout, elle prévoit que l’accès à ces logs, par les autorités policières, ne soit plus soumis à l’autorisation d’un juge. Il sera désormais encadré par une «personnalité qualifiée», nommée «auprès du ministre de l’Intérieur».
Il ne s’agira pas d’un magistrat, mais d’un haut fonctionnaire de la police nommé par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS). Autorité administrative indépendante, elle est est chargée de veiller au respect de la réglementation en matière d’interceptions de communications privées, comme les écoutes téléphoniques.
Un choix qui écarte donc tout contrôle judiciaire et qui a motivé les sénateurs socialistes à saisir le Conseil constitutionnel. Ils estiment notamment que seul un juge doit autoriser l’accès à ce type de données.
Le fond de texte demeure inchangé
Les garants de la Constitution ne les ont pas suivis, jugeant que le principe de cette disposition n’était pas anticonstitutionnel. Toutefois, ils exigent la suppression d’un mot de son énoncé; l’article 6 indique en effet que la rétention des logs vise à «prévenir et réprimer les actes de terrorisme».
Or, la Constitution française prévoit une séparation des pouvoirs entre les autorités administratives chargées de la prévention des actes criminels et les autorités judicaires chargées de leur répression. En liant les deux, «le législateur a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs», peut-on lire dans la décision. Cette référence à la répression est donc supprimée.
«La décision du Conseil est un avertissement très significatif envoyé au gouvernement», déclare à ZDNet.fr Jean-Pierre Sueur, sénateur PS du Loiret. «Elle est importante, car elle rappelle au gouvernement la nécessité de respecter le principe de la séparation des pouvoirs.»
Un changement sur la forme qui ne modifie cependant rien sur le fond, relève le Syndicat de la magistrature (SM), opposé au projet depuis le début avec l’association Iris (Imaginons un réseau Internet solidaire) et de la Ligue des droits de l’homme (LDH).
«La décision du Conseil laisse quasiment intacte toutes les dispositions de ce projet auxquelles nous sommes fortement opposés», commente pour ZDNet.fr sa vice-présidente Agnès Herzog, par ailleurs juge au tribunal de Bobigny. «Le Conseil a simplement rappelé une évidence qui est la distinction entre le pouvoir administratif et le pouvoir judicaire.»
Le président de la République doit à présent promulguer le texte, ce qui est prévu avant le 3 février. Ensuite, ses dispositions seront précisées par des décrets d’application, notamment au sujet de la durée exacte de conservation des logs et des établissements concernés, pour une durée limitée de trois ans. Le Parlement sera donc consulté de nouveau en 2008.